De riches marchands embarquent à bord d'un navire avec leurs
biens, leurs esclaves et leur orgueil d'hommes à l'abri de tout besoin.
Les marins portent leurs malles remplies de bijoux, d'or et de riches
étoffes alors qu'eux n'ont pour tout bagage qu'un méchant sac vide et une
vieille couverture.
Mais la mer se fait d'huile et le
vent n'est pas décidé à se lever.
A bord, les marchands se conduisent comme s'ils commandaient
à Dieu eux-mêmes et son destin en pestant contre les astres, en regrettant que le
vent ne souffle pas avec plus de force et en humiliant les marins qui ne
"connaissent rien à l'art de la navigation".
Tant et si bien que le Dieu finit par les entendre et décide de
répondre à leurs vœux en envoyant une terrible tempête pour les punir.
Les nuages noirs s'amassent à l'horizon et le vent s'annonce par
petites rides de plus en plus rapprochées sur la surface de la mer. Les marins
comprennent qu'ils vont vivre de terribles heures et se tiennent prêt à
leurs postes, tandis que les riches marchands, heureux que Dieu les aient
entendus, raillent la couardise de l'équipage.
Au pire de la tempête, les marins s'aperçoivent qu'ils ne pourront
pas s'en tirer sains et saufs sans larguer du lest.
Soucieux de sauver leur navire, ils n'hésitent pas à passer les
bagages les plus lourds par-dessus bord. Mais les riches ne l'entendent pas de
cette oreille et s'accrochent à leurs malles comme si c'était elles qui
allaient les sauver.
Ils supplient les Dieux de les épargner et pleurent comme des enfants. Le
capitaine du bateau est forcé de menacer d'en jeter quelques-uns à l'eau avec
leurs coffres pour qu'ils acceptent de se séparer de leur or.
L'énorme poids ainsi libéré, le navire retrouve sa stabilité.
La tempête se calme aussitôt et l'équipage est sauvé. Les marins sont heureux
mais les riches marchands restent silencieux : avec leur richesse, c'est leur
vie qu'ils croient anéantie.
Qu'est-ce qui est le plus important
: nos biens ou notre vie ? Trop souvent, pour nos biens matériels nous mettons
notre santé en péril. Nous consacrons notre vie à l'argent, et la vie nous file
trop vite entre les doigts.
Comment gagner notre vie... sans la perdre ?
A l'image de ces marchands, moins nous avons de bagages à porter, plus
notre fardeau sera léger... et moins la tempête sera redoutable.
« Celui qui perd la richesse perd beaucoup. Celui qui perd un ami
perd davantage. Mais celui qui perd courage perd tout. » CERVANTES
MOM